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Le blog littéraire de Cedric Josse
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  • Ce blog mélange récits, expériences personnelles, analyses et critiques de la société le tout ponctué de commentaires sur l’actualité nationale/internationale. Este blog mezcla relatos, experiencias personales, análisis y critica de la sociedad.
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30 mars 2009

Carta a George (Lettre à George)

animal_farmIronie du sort qui voulu que cette place porta ton nom. Ici les animaux sont bien réels, ce sont les hommes! A bout de souffle, éreintés, extirpés de la fournaise de la rue bruyante, c’est ici qu’ils atterrissent venant noyer leur mal de vivre dans un verre puis un autre… Et bientôt le breuvage maléfique prend les rennes de leur inconscient, les tirant un peu plus loin vers cet l’enfer ou l’alcool règne en maître. Arrivés là sans volonté dans l’unique but de boire toujours et encore, ils déambuleront jusqu’au du soir dans le large couloir. Les portes béantes de l’entre grande ouvertes sur une place happant dans ses entrailles d’autres miséreux sur leur passage. C’est d’un pas résigné que la plus part d’entre eux franchit le seuil de l’établissement, conscients de leur faiblesse ils ressortiront quelques heures plus tard à demi inconscients! Pour échapper au soleil brûlant et tenter d’éteindre le feu qui les dévore de l’intérieur, rien d’étonnant qu’ils trouvent refuge ici, dans la pénombre et de fraîcheur de ce bar immonde ou pour une poignée d’euros ils étancheront leur soif de mort ouvrant grand le robinet de l’alambique qui distillera son nectar dans leur veines en manque. Pour le refermer ils feront un joint solide avec un peu de l’herbe qui pousse plus loin. N’est-ce pas là ce que recherchent tous les mammifères, un abreuvoir avant de continuer le voyage vers d’autres pâturages. A flan d’immeuble et sans devanture racoleuse la taverne maléfique prend le liquide des pauvres et le transforme en eau de vie. Accomplissant son travail de sape, en aspirant toujours plus et n’en laissant échapper que quelques uns par la porte entre baillée de la cuisine, avec les eaux usées, dans un relent tonitruant. Dans la mélasse qui dégueule parfois jusque sur le trottoir tout l’inhumain du genre humain y est représenté. Les poivrots, seul, par paires ou en bande succombent à l’enchantement de cette mascarade où les figurants qu’ils sont on le beau rôle, le mauvais! Ils s’empiffrent jusqu'à la gueule, d’alcool et boivent la mélopée commerciale de nymphes au charme palatin qui leur servent à la louche et de la pointe de leur accent napolitain un discourt prétextant mille raisons de rester et continuer à boire et à s’amuser. A leurs dépends bien sûr, ici si le client est roi, il est le roi des cons! Seul maître à bord et avant Dieu qui déteste l’ivrognerie et quitta le navire en son temps laissant ses oilles en prise à leur tragique destin! Attiré comme les autres, j’y ai trouvé ma place, juché sur un tabouret giratoire éculé, bien décidé moi aussi à me faire un peu enculer, j’éperonne tant bien que mal les chromes occis du repose pied, le cul calé dans la galette rougeoyante en vinyle lacérée d’où s’échappe une mousse maculée couleur pisse. C’est parti pour un tour gratuit qui coutera cher à mes artères! Au son du tango, du reggaeton ou du dernier succès de cet été meurtrier, je suis fin prêt pour la première bière de la journée et certainement pas la dernière!  Dans la chaleur artificielle les liens se créent, les langues se délient, se liant parfois aussi dans un tourbillon chargé de houblon bon marché! Pour pénétrer ici pas de pate blanche à montrer. Le nivellement se fait par le bas et la guess list à des allures de bottin immonde. Loin du gotha de L’Example et des beaux quartiers bienvenu dans les bas fonds, le ghetto des soulards et des poivrots. Celui des gueules cassées, abimées, mal rasées, pas lavées depuis des jours, n’ayant pas vu un lit depuis des nuits, tenant debout maintenus uniquement par leur crasses et le poison qui fouette leur sang. Ils boivent à en crever, fuyant leur vie d’esclaves, trop lâches pour en finir ils se feront péter la rate ou crèveront d’une cirrhose à cinquante ans. La horde sauvage des leveurs le coude à pris place cette nuit encore aux abords du comptoir, fonctionnaires au rebut loin de leurs classeurs, vieux intellos philosophant dans le vague, artistes sans talent à la dérive échoués il y a bien longtemps sur les rives de la capitale catalane, prisonniers de leur condition et incapables de reprendre le large, troubadours sans joie lassées de distraire les touristes se retrouvent ici chaque soir pour oublier. Autour du zinc poisseux, du bandit manchot, et de salopes entre deux âges, ils balancent la monnaie pour un rêve éphémère. Sous les regards d’autres pas plus fortunés qui trimbale épouse jadis modèle, conjoint boiteux sans béquilles, marmaille purulente sentant encore l’odeur des couches et vieillard sénile retombant en enfance, qu’il se coltine chez par loyauté et parce qu’il leur aura laissé une petite dote avant de perdre les pédales. Par esprit de solidarité ils se rincent le gosier tous ensemble, sans distinctions de races ou de rang, venant voir, venant boire le grand spectacle de la comédie humaine! Les vieux singes grimaçant à bout de forces qui campent las depuis des lustres mirent la bleusaille égarée qui s’est aventuré dans leur fief sur les conseils mal renseignés d’un guide désuet et d’un air canaille leur font signe de s’approcher et les invitent à écouter leur histoire en échange d’un petit verre. C’est une histoire universelle, toujours la même, qui s’empile comme les verres vides et s’additionne au fil des récits de nouveaux faits jusqu’à devenir énorme et dépasser des mûrs de leur imagination ravagée. Ainsi élargie de nouveaux chapitres le fond demeure le même et l’argumentaire inchangé. La fable a pour héro unique un pauvre diable aux prises avec lui-même, un compte vieux comme le monde, le leur, le nôtre! Leur récit éructé ans un jargon bileux, la timbale vide et pleins comme des citernes, ils regagneront leur tanière. Confort précaire d’une piaule ou les attend une femelle, un clébard, un marmot, ou la télé qui braille. Pour les plus démunis ayant jeté tout leur argent par les fenêtres et puis dans la vinasse il n’y aura que la froideur d’une paillasse dégueulasse jetée à même le sol. Dans un amas de cartons et de papier journal, à poil et part une nuit sans étoile, vautrés dans leur dégueulis ils se rendront à Morphée. Assommés par l’alcool, s’oubliant dans un sommeil réparateur, colmatant les brèches de ce qui peut être sauvé ils revivront leur vie en rêve et se réveilleront tout étourdit pour ceux qui le feront. Et toi là-haut tu nous regardes en silence écoutant ronfler la bête qui sommeille en chacun de nous!

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