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Le blog littéraire de Cedric Josse
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  • Ce blog mélange récits, expériences personnelles, analyses et critiques de la société le tout ponctué de commentaires sur l’actualité nationale/internationale. Este blog mezcla relatos, experiencias personales, análisis y critica de la sociedad.
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24 janvier 2009

2750

art_encheres

Et 50 qui font 2750!..

Après quatorze heures de train, quelques stations de métro et une demi heure de RER, me voici sur les lieux, près pour l’estimation d’une vie de sacrifices! J’avais du marcher encore vingt bonnes minutes pour gagner le pavillon où notaire et commissaire priseur m’attendaient pour dresser le bilan de cette vie qui s’en était allée comme tant d‘autres beaucoup trop vite. Quittant le centre ville du hameau, je gagnais les hauteurs. Derrières les façades en meulière des demeures bourgeoises de l’avenue du Maréchal Foch, se cachait une autre réalité. Un vaste quartier jadis ouvrier s’étendait tout autours de l’ancienne fabrique Pathé. C’était là entre l’usine et le cimetière qu’était la maison. Au beau milieu de nulle part, parmi d’autres maisonnettes sinistres qui en des temps révolus abritèrent sans doute les cadres et ouvriers de l’usine toute proche qui leur concédant un lopin de terre gardait ainsi le joug sur ses troupes. Quelques décennies plus tard, il ne restait plus qu’un amas hideux de constructions de fortune faites de matériaux bon marchés et qui faisaient la pige au temps. Gargotes en tous genres et sans style imbriquées les unes aux autres et arrangées avec le goût et les moyens de l‘époque. Il n’était pas rare que dans ce capharnaüm architecturale le jardin de l’une n’appartint à la maison du voisin. Tant et si bien qu’il était impossible pour qui ne vivait là de dire où démarrait et terminait la propriété de l‘autre et il en était ainsi de tout le pâté de maison. Je reconnus néanmoins sans peine au fond d’une allée de gravier la bicoque chétive et malade de mon vieux, triste à pleurer comme dans mon souvenir et contre toute attente toujours sur pieds. Cella là même d’où l’on m’avait chassé quelques vingt ans plus tôt! Comme j’étais en avance, je décidais de suivre la rue en quête d’un bistrot dont je savais l’existence. A la croisée de deux voies et malgré le temps passé, le café était toujours là qui m‘attendait! Malheureusement il était fermé! La lumière du jour déclinait à vue d’œil, moitié faute au temps pourrit de janvier moitié faute à la nuit précoce qui déjà pointait son nez. Je décidais de poursuivre ma route, sans trop m’éloigner pour autant et arrivais à une petite rotonde. Une pharmacie, un commerce d’alimentation et une boulangerie, ici la vie avait repris. Rien de trop grand certes, juste une petite lueur dans le l‘obscurité. Faute d’un café pour me réchauffer je pourrai toujours m’offrir une pâtisserie. J’optais pour un « togolais », sorte de congolais déguisé dont le cœur de coco était baigné de chocolat. A la différence de son cousin plus connu par chez nous on pouvait facilement en expliquer le sobriquet. Il n’y avait décidément que les français pour donner des noms pareils à leurs gâteaux! Je me souvins de mon enfance, quand réunissant péniblement trois francs je me précipitais chez la boulangère y acheter une « tête de nègre » aujourd’hui rebaptisée meringue au chocolat ou boule au chocolat dans certains cas. Peut-être parce que nous étions dans une petite ville de banlieue où jamais un noir ne passait, le « togolais » lui se maintenait en place.

- Un euro cinquante!

- Dites-moi, vous ne connaîtriez pas un café ouvert dans coin?

- Ben si! Il y en a un par là!

- Le Royal?

- Ben oui, le Royal!

- Je suis passé devant, mais il était fermé.

- Ben t’entends ça, le Royal il est fermé!

- Peut-être est-il fermé le lundi?

- Ben non, c’est impossible on l’a livré ce matin!

- Je vais regarder de nouveau, de toutes façons je repasse par là.

Ils n’ont sans doute pas allumé les lumières conclut la boulangère. Tiens, c’était curieux ça, un bar qui ouvrait sans mettre la lumière! Je la remerciais de son amabilité et séance tenante rebroussais chemin pour voir de mes yeux de quoi il en retournait. Vu du trottoir d’en face il m’avait bien paru fermé ce bistrot, mais à y regarder de plus près et collant mon visage à la vitre je distinguais des loupiotes vertes au dessus du comptoir. Plus de doute il était bien ouvert! Je poussais la porte d’entrée et pénétrais après avoir sauté d’un bon la marche du perron dans le troquet désert. Un petit chinois sortit comme par magie de l’arrière salle et me demanda prestement ce que je prendrai. Un décaféiné! Il regarda déconcerté l’imposante machine à café avec tous ses boutons et tous des robinets puis disparu comme il était venu. Un autre chinois, un peu plus grand apparut sur le champs. Courtois et souriant, le papa du premier sans doute, il se mis en devoir de me préparer l’express demandé. Actionnant la bonne molette, le précieux nectar coula aussitôt dans la petite tasse posée pour le recueillir. Je n’avais jamais bu un déca aussi corsé! Je le happais par petites gorgées parcourant le Parisien qui traînait sur le bar. Un bruit sourd et métallique nous fit sortir mon chinois et moi de notre méditation et regarder en direction de la rue. J’avais d’abord cru que la voiture à l’arrêt pile devant la porte avait emporté l’un des plots de sécurité caractéristique à ce genre d’intersection. Poussé par la curiosité de ce fait divers inattendu, je m’approchais de la porte vitrée et vis qu’il n’y avait pas un véhicule mais deux et que la barre reliant le second au premier venait de lâcher! Je retournais déçu à mon tabouret et repris ma lecture. Le patron qui se donnait des airs affairés derrière son comptoir, ne pouvant feindre plus longtemps alla s’assoire à l’une des tables vides après m’avoir lancé que « vu le temps » il était fréquent de voir ainsi une voiture qui venait de caller remorquée par une autre. Une petite asiatique fais alors son entrée. Jeune et jolie, elle me regarda et me sourit bon enfant se demandant en elle ce que cet étranger pouvait bien foutre et à une heure pareille dans le buis buis sans charme de son paternel. Après avoir salué sa petite famille, elle pris place à une table donnant dans ma direction. Faussement occupée elle aussi, elle me dévisageait copieusement croyant que je ne l‘avais pas vu. Puis quand je tournais la tête et la regardais à mon tour elle me répondait d’un nouveau sourire innocent presque timide mais sans gène. Sans doute aurais-je pu m’assoire à sa table et bavarder un moment avec elle mais l’heure n’était pas à la bagatelle. Repliant le journal, je réglais ma consommation, saluais chaleureusement la petite troupe et sortis retrouver le froid hivernal. Mon automobiliste était là, un peu plus loin qui tentait maladroitement de pousser sa voiture. Je lui prêtais mains forte, amusé de la situation et ensemble nous garâmes son bolide sur le terre plein du garage deux numéros plus loin que là où je me rendais. Dissimulé derrière de grosses lunettes solidement rivées à son nez, le commissaire priseur etait là qui d’une voix sûre fît tomber le montant de la prisée.

- Et 50 qui font 2750!

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